Le voile est hijab en arabe, évoqué huit fois dans le Coran avec des significations différentes.
Le voile de Dieu
Le premier sens du mot « voile » concerne la notion de la Révélation de Dieu qui ne communique avec les hommes qu’à travers un voile (Cr. 42 : 51). Ce voile symbolise la pudeur de Dieu. En effet, « Dieu est pudique, il aime la pudeur et la discrétion », dit le hadith. (Abû-Dâwûd).Ce voile est une lumière (Muslim). Les mystiques, en s’appuyant sur une tradition du Prophète qui n’est pas authentifiée, se sont lancés dans des commentaires ésotériques sur les significations des 70 voiles de lumière qui nous cachent Dieu (Tabrâni). Certains y voient plutôt des voiles intérieurs, qu’il faudrait percer pour voir Dieu par l’oeil du coeur.L’existence de voile de lumière qui cache Dieu est confirmée par un autre hadith. Celui où le Prophète parle, lors de son ascension vers le ciel, d’une lumière qui l’empêchait de voir directement Dieu (Muslim).Cependant, Dieu apparaîtra aux croyants le jour dernier (Cr. 75 : 23), sauf à ceux dont le voile de l’orgueil a empêché leurs yeux de voir la véracité du Prophète (Cr. 17 : 45 ; Cr. 41 : 44). À ceux-là, Dieu ne se manifestera pas, affirme le Coran (Cr. 83 : 15). Est-ce un voile simplement temporaire ? On est tenté de le croire d’après ce que l’on sait de la miséricorde infinie de Dieu, que sa lumière atteindra tout le monde avec des nuances différentes.
Hijab, voilage des épouses du Prophète
Plus prosaïque, le voile peut signifier un simple rideau, un voilage, comme celui qui dissimule exclusivement les épouses du Prophète. Un rideau. Le Coran leur demande de garder une distance avec les hommes et de ne leur parler qu’à travers un voile (Cr. 33 : 53) et de ne pas sortir de leur maison (Cr. 33 : 33). Cette dernière disposition n’a pas été appliquée à la lettre par les épouses du Prophète, puisqu’Aïcha est allée jusqu’à conduire une armée pour combattre les assassins d’Othman, le troisième calife.Néanmoins, elles ont toujours respecté l’esprit du verset du voile en conservant une distance symbolique avec les hommes. Elles cachaient leur visage même pendant le pèlerinage, alors qu’il est exigé pour les autres femmes de découvrir leur visage lors de ce rite. Elles n’ont pas à imiter les épouses du Prophète compte tenu de leur statut particulier (Cr. 33 : 32).
Le khimar
C’est une couverture, plutôt un couvre-chef. Le Coran demande au Prophète de dire, entre autres, aux femmes musulmanes de rabattre sur leur poitrine le pan du tissu qui descendait de leur couvre-chef afin de cacher leur poitrine (Cr. 24 : 31). Il s’agit d’un geste de pudeur élémentaire.Quant à la couverture de la tête, le Coran ne l’a pas demandé explicitement, car tout simplement c’était une culture vestimentaire qui concernait les femmes comme les hommes. « Le couvre-chef (khimar) représentait pour les femmes ce que les turbans (al-‘amâ’im) représentaient pour les hommes », fait remarquer Ibn-Hajar, le commentateur de Bukhârî.
Le jilbâb
Le Coran demande au Prophète de dire aux femmes de porter un jilbâb, un habit d’extérieur que les femmes mettaient avant de sortir de chez elles. Selon les circonstances de la Révélation du verset en question, il s’agit de mettre cet habit la nuit avant de sortir pour satisfaire leurs besoins naturels (les toilettes étaient situées à l’extérieur des maisons) et pour se protéger des voyous (Cr. 33 : 59). Omar, compagnon du Prophète et deuxième calife, avait compris que ce verset ne concernait que les femmes libres ou nobles. C’est pourquoi il interdisait aux esclaves de le porter.Un tel code vestimentaire existait déjà dans des traditions plus anciennes, permettant de distinguer la femme noble ou mariée de la femme esclave ou célibataire. Dans cette culture, les esclaves, chargées des travaux domestiques, devaient être plus mobiles, donc moins habillées. De même que les femmes libres n’avaient même pas l’obligation morale d’allaiter leurs enfants, elles les confiaient à des nourrices (Cr. 65 : 6).
De fait leur mobilité était très réduite et donc elles étaient plus couvertes.En effet, la pudeur est une valeur morale universelle. La forme des vêtements, quant à elle, obéit à la mobilité, à la nature du travail, au climat et aux codes culturels.
Le savant réformiste Tahar ibn Achour, soulignant cette distinction entre le sens et le signe, a dit : « Les peuples dont le jilbâb n’est pas l’habit traditionnel ne sont pas concernés par cette prescription coranique. »
Le coran pour les nuls en 50 notions clés – collection pour les nuls culture générale – Nov 2019 – Tareq Oubrou – p294 à 296