mardi, avril 23 2024

Comme il existe une épistémologie scientifique, une épistémologie poétique, nous plaidons ici l’existence d’une épistémologie mystique possible qui n’est pas de l’ordre du simple rationnel strict ni de l’irrationnel déraisonnable non plus, mais peut-être d’une métaphysique « arationnelle », mais qui intègre cependant une certaine rationalité, tout en la transcendant.
Si la théorie veut dire étymologiquement « contemplation » et contient dans son sens le « voir », alors le soufi qui part d’une croyance -une théorie- sur l’Unique (‘aqîda) s’engage dans une démarche de dévoilement dynamique pour la vérifier en la réalisant par une perception vraie du réel, sans tomber dans le piège d’une imagination qui déformerait l’«image» de la vérité de Dieu. C’est là un obstacle épistémologique bachlardien que rencontre tout chercheur de vérité. Cet obstacle réside en effet dans le fait qu’au lieu de trouver la Vérité ou le Réel de l’Unique, le cheminant finirait par trouver ce qu’il chercherait au départ, à cause de son imaginaire fixe. Il s’agit tout simplement d’une psychanalyse de la connaissance, autre concept de Bachelard, en quête d’une complémentarité entre l’imaginaire et la rationalité.
L’exposé trace sommairement depuis l’écoute jusqu’à la vision quelques étapes du dévoilement, comme une marche vers la Vérité. L’objectif est d’introduire selon une approche fondamentale mystique où la connaissance part de la foi ( équivalent scientifique d’une théorie) pour atteindre la connaissance divine ultime, en passant par une approche expériencielle mais asymptotique et humble de la connaissance de Dieu à travers le monde mais aussi directement grâce à l’intériorité subjective, et qui engage tout l’être humain, mobilisant toutes ses capacités intellectuelles, morales et spirituelles. C’est en résumé le sens même de deux notions cardinales de l’islam que sont : al-ijtihad et al-jihâd. Le premier représente l’approche intellectuelle et intuitive ; le deuxième est du domaine de la pratique moral et spirituel. La connaissance relève ainsi de l’exercice de la raison, de la sensibilité et de l’action engagée dans voie de la rectitude.

Le dévoilement (al-kachf)
Pour une épistémologie soufie de la connaissance
Cet article se trouve dans la revue « Horizons Maghrébins-le droit à la mémoire, n° 65/2011, 27e année » p.172-180 – Tareq Oubrou

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