mardi, décembre 3 2024

Si l’on admet que le croire suppose le voir -comme l’a demandé Abraham à Dieu quand il a voulu voir des preuves sur Sa capacité à ressusciter les morts – alors le voile empêche de voir et donc de croire. Les voiles intérieurs des passions et de la suffisance aveuglent en effet le cœur, comme le souligne le Coran . Effectivement, quand l’esprit n’est plus disponible, les sens tombent en panne et l’Homme devient incapable de sentir ou « intuitionner » les choses.
Selon l’épistémologie mystique d’Ibn-Arabi, seuls les sens sont capables d’atteindre la gnose (al-ma‘rifa) ou la connaissance de Dieu. Connaître Dieu dans cette perspective épétimologique n’est pas savoir Dieu, car le savoir (al-‘ilm) convoque l’intellection uniquement et la raison rationnelle, alors que la connaissance mystique vise plus que cela. Elle a pour projet de percer par l’œil intérieur les voiles qui nous cachent Dieu et la Réalité. Il est vraiment question ici d’une certaine phénoménologie mystique de l’Être où le cœur symbolise le miroir dans lequel viennent se réfléchir la beauté et la bonté de Dieu mais aussi la réalité objective perçue par le croyant connaissant dans une subjectivité qui réalise cependant le discernement et non la confusion. Ici subjectivité et objectivité se nourrissent l’une de l’autre. C’est pour cette raison que la démarche soufie s’occupe d’abord à le purifier -ce cœur- par les ablutions de l’humilité, entre autres attitudes, condition nécessaire pour y voir le plus clairement possible l’image de Dieu.

Le dévoilement (al-kachf)
Pour une épistémologie soufie de la connaissance
Tareq Oubrou

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